La responsabilité internationale des Etats en mer
Le droit international de la mer contemporain est principalement régi par la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer de 1982, même s’il trouve également ses fondements dans le droit international coutumier. Il consacre d’innombrables obligations à la charge des Etats, aussi bien dans les espaces sous leur juridiction nationale que dans les eaux internationales, mais également à travers les activités et les actions que ces Etats pourraient y mener, autoriser ou patronner. La violation de ces obligations par les Etats constitue au sens du droit international un manquement susceptible d’engager leur responsabilité internationale. Cependant et malgré la multiplication des faits illicites en mer, cette responsabilité semble parfois ignorée ou simplement écartée, en raison des problèmes liés à sa mise en œuvre, et particulièrement pour les violations ayant lieu dans un espace maritime international. Ces difficultés ou imperfections nous amènent à réfléchir de manière approfondie sur le régime de la responsabilité internationale des Etats en mer, pour savoir d’une part, s’il connaît des faiblesses ou des insuffisances ; et d’autre part comment y remédier. Certes, la notion de responsabilité est évoquée de façon sporadique dans la Convention de 1982, et les questions de responsabilité internationale des Etats semblent réglées par le projet d’articles sur la responsabilité internationale des Etats de 2001. Même si ce dernier reste un cadre général, il s’en dégage une certaine obligatoriété du fait du caractère coutumier de certaines de ces règles. C’est le cas notamment de l’article 1er relatif à la condition d’engagement de la responsabilité internationale des Etats, ainsi que l’a relevé la Chambre spéciale du Tribunal international pour le droit de la mer dans l’arrêt rendu sur le Différend relatif à la délimitation de la frontière maritime entre le Ghana et la Côte d’Ivoire dans l’océan Atlantique le 23 septembre 2017, aux termes duquel le Tribunal jugea que cette clause « reflète le droit international coutumier ». L’identification des obligations en mer, de leur nature, de leur contenu et de leur portée permet d’analyser les conditions de mise en œuvre de la responsabilité internationale des auteurs de la violation ainsi que les conséquences qui s’y rattachent. De même, au regard de la différenciation des espaces et des activités, comme des situations au titre desquelles l’Etat peut se trouver impliqué, qu’il s’agisse de l’Etat côtier, du pavillon, du port, ou du marché, une réflexion s’impose quant à l’existence d’un ou de plusieurs régimes de responsabilité des Etats en mer. En outre, et a fortiori, dès lors que le Tribunal international du droit de la mer a déclaré le 1er février 2011 dans l’avis relatif aux Responsabilités et obligations des Etats qui patronnent des personnes et des entités dans le cadre d’activités menées dans la zone, que « tout Etat Partie pourrait également prétendre à réparation au vu du caractère erga omnes des obligations ayant trait à la préservation de l’environnement en haute mer et dans la Zone », il va de soi que le problème du titulaire du droit à engager la responsabilité d’un Etat, alors même que le dommage survient dans un espace international, revêt une grande importance en l’état actuel de développement du système juridique international contemporain. A travers ces problématiques, l’analyse menée dans la présente thèse entend contribuer à l’étude des différents aspects de l’épineuse question de la responsabilité internationale des Etats en mer. En ce sens, son originalité repose sur l’effort de clarification que la recherche menée est susceptible d’apporter sur une question complexe.