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L'obligation constatée par jugement.

Dans un premier temps, il est nécessaire de définir le sujet avant de dégager les intérêts s'y rattachant. Par définition, Une obligation est un lien de droit par lequel une ou plusieurs personnes, le ou les débiteurs, sont tenues d'une prestation envers une ou plusieurs personnes, le ou les créanciers. L'obligation va naître par la volonté des parties : c'est ce que l'on appelle la théorie de l'autonomie de la volonté. A titre d'illustration, il s'agit typiquement de la situation où le débiteur doit payer une certaine somme d'argent au créancier : ici l'obligation se matérialise par le paiement de ladite somme d'argent. L'autonomie de la volonté est un principe classique du droit des contrats, droit des contrats qui, depuis 1804, ne connut aucune réelle modification jusqu'à la réforme du 10 février 2016. Si le législateur ne s'est penché que très récemment sur un remaniement du droit des contrats, il a en revanche constamment renforcé les pouvoirs du juge. Et si l'obligation née de la volonté des parties, on va alors se demander quel rôle aura le juge dans cette obligation, en d'autres termes lorsqu'il va venir constater l'obligation. Par un jugement, c'est-à-dire l'examen d'une affaire en vue de lui donner une solution, le juge va venir constater l'obligation. Plus précisément, le juge va relever l'existence de cette obligation. Dans l'exemple précité, le juge va venir constater que le débiteur doit effectivement payer une certaine somme d'argent au créancier. Ainsi, en droit français, les obligations existent indépendamment des jugements, lesquels ne font normalement que les constater. Cependant, cette conception n'est pas universelle : en droit romain, considéré comme l'un des premiers systèmes juridiques de l'histoire qui a inspiré de nombreux droits contemporains dont le droit français, le jugement avait vocation à éteindre une obligation par la création d'une nouvelle destinée à remplacer l'ancienne. Il est vrai que le terme « constatée » peut paraître, sous certains aspects, équivoque : on peut en effet se demander si le juge ne va pas venir créer dans certains cas des obligations. Quand le juge condamne la partie perdante à payer les frais de justice, il sera véritablement créateur de cette obligation. Il sera nécessaire d'évoquer cette distinction dans les travaux. Pour autant, les développements seront, comme l'indique le sujet de la thèse, essentiellement relatifs à l'obligation constatée par jugement. On devra donc s'interroger sur l'apport de cette reconnaissance de l'obligation par le juge alors que cette dernière existe déjà par la volonté des parties. D'autant que le constat de l'obligation par jugement va emporter diverses conséquences. La doctrine distingue l'effet substantiel de la décision et ses attributs : l'effet substantiel désigne ce que décide le juge, l’œuvre propre du juge (par exemple, il s'agit de la condamnation du débiteur à payer la somme d'argent) tandis que les attributs correspondent à toutes les suites que cette décision implique automatiquement de par la loi en dehors de toute volonté du juge, quel que soit le contenu de la décision du juge. Les attributs du jugement correspondent de ce fait aux conséquences de la condamnation. Parmi ces conséquences, la principale d'entre elles tient à ce que le jugement constatant une obligation constitue un titre exécutoire permettant l'exécution forcée de celle-ci. En d'autres termes, si le débiteur ne s'acquitte pas spontanément de son obligation telle payer le créancier, des poursuites peuvent être mises en œuvre afin de recouvrer la créance due. Bien évidemment, d'autres conséquences peuvent être relevées telles la majoration de plein droit du taux des intérêts moratoires en cas de retard dans l'exécution de l'obligation ou encore à l'égard de la prescription (qui est l'extinction d'un droit après l'écoulement d'un délai) de l'obligation. Ces éléments conduisent à relever l'intérêt d'entreprendre cette thèse. Et cet intérêt se décline sur deux niveaux. Sur le plan pratique, on se penchera sur l'utilité à faire constater par le juge une obligation existant déjà par la volonté des parties. Les recherches permettront d'éclairer les différentes conséquences de la constatation d'un jugement qui restent relativement obscures. En effet, quand le juge condamne le débiteur à payer une somme d'argent au profit du créancier, il existe de véritables ambiguïtés quant aux conséquences de la condamnation : quel est le régime du droit à intérêts ? Quels sont les effets d'un délai de paiement sollicité par le débiteur ? Quelles sont les sûretés (c'est-à-dire les garanties d'exécution) assorties à l'obligation résultant de la condamnation ? Quel délai de prescription faut-il appliquer si le créancier néglige d'invoquer la condamnation pendant un certain temps ? La pratique démontre un véritable embarras quant à ces différentes questions. Sur le plan théorique, il sera question de développer la notion d'attribut du jugement, notion certes purement doctrinale mais qui revêt un caractère davantage solennel car la jurisprudence l'a récemment consacrée via trois arrêts rendus par la deuxième chambre civile le 18 février 2016. Ces arrêts sont d'autant plus intéressants car ils soulèvent une autre question qui nécessite de réels développements : la spécificité de la notion d'attribut du jugement. En effet, le jugement est un type de titre exécutoire parmi tant d'autres (comme par exemple l'acte notarié, la transaction homologuée...). De ce fait, il faudra comparer les attributs de ces derniers avec ceux du jugement afin de savoir s'il existe une spécificité pour les attributs du jugement. Si la spécificité se démarque de manière insuffisante, il faudrait revoir l'intitulé de la thèse et de traiter de manière plus générale « L'obligation constatée par un titre exécutoire ». Il convient enfin de s'intéresser au corpus de la thèse. Les précédents développements ont pu laisser entrevoir certaines sources qui seront utilisées. Il faut d'ores et déjà préciser qu'il existe peu d'ouvrages ou d'articles traitant de cette question. Il faut se tourner vers d'autres sources à commencer par la loi : on l'a vu, c'est la loi qui indiquent les différents attributs du jugement et leur mise en application. Il est donc logique que la loi soit la première source dans le travail de recherches. Mais s'il existe des hésitations, comme il a été dit précédemment, la réglementation est de ce fait incomplète. Se tourner vers la jurisprudence paraît donc judicieux pour alimenter les travaux. La jurisprudence constitue une précieuse ressource dans le travail de recherche. Pour être plus précis, le jugement peut se décliner en différentes formes : par exemple, le jugement est dit provisoire quand il ne peut être modifié par une nouvelle décision de justice à la différence du jugement définitif où une telle décision revêt l'autorité de la chose jugée à savoir qu'il ni y a plus la possibilité de la contester. Bien évidemment, d'autres jugements existent tels le référé ou encore la sentence arbitrale. Ce sont donc ces différentes formes qui constitueront des éléments de réponse pertinents dans les développements. Afin d'aborder de manière complète et précise la problématique, il est nécessaire de faire du droit comparé. Plus particulièrement, il faudra s'intéresser aux jugements étrangers, jugements qui ont force exécutoire dans l’État dans lequel ils ont été rendus mais pas en France.