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Ordre public et concurrence

Au fil des années, deux notions sont devenues cardinales en droit du marché, celles de concurrence et d'ordre public. Ainsi, la concurrence est considérée comme étant, par elle-même, bénéfique notamment au bien-être de la population ou à l'économie et est devenue un objet voire un impératif d'une véritable politique publique. Notion proprement juridique, l'ordre public s'apparente à un standard minimal de la vie et de la paix sociales, nécessaire à l'égal exercice des droits et libertés de tous les individus dans la société. Le recours à cette notion permet à l'État de trouver un équilibre entre un désordre supportable – et sans doute inévitable – et un ordre indispensable. Or, l'enjeu réside dans la question de savoir quelle est la place de la concurrence dans la détermination juridique de ce qui est essentiel à une société. La concurrence est-elle un ordre crée par les pouvoirs publics, ou simplement contrôlé par eux ? Est-elle une source de désordre tel que les pouvoirs publics doivent la limiter ? Le bénéfice accordé à la concurrence est-il suffisant ? Peut-elle aussi être contrée par d'autres impératifs d'ordre public ? Traditionnellement, l'UE considérait que l'ordre public ne pouvait être détourné de sa fonction propre et être invoqué à des fins économiques puisque, sur le marché, seule la liberté permettrait de produire le meilleur résultat. En réalité, s'est progressivement affirmée l'existence, en droit positif, d'un ordre public économique permettant aux pouvoirs publics de maintenir, de contrôler voire de créer la concurrence. Mais alors, il devient primordial de réfléchir à cette mutation de la police de la concurrence dès lors que cette dernière, sous couvert de veiller à l'ordre public, risque de se transformer en un dirigisme concurrentiel. L'enjeu de cette thèse est alors de déterminer dans quelle mesure l'ordre public (voire les ordres publics) ainsi envisagé(s) vient (viennent) au soutien ou à l'encontre de la concurrence.